Rencart (2)

Parfois on ne s’y attend pas, et on est surpris.

Amoureusement 2021 avait été pleine de surprises justement tandis que l’année 2022 a été ponctuée de déception. Pourtant j’essaye. Je rencontre plus facilement et plus rapidement depuis la fin des confinements, je tente d’être moins sélectif, de ne pas m’arrêter aux premières grossières fautes d’orthographe (j’ai dit j’essaye hein, je n’y arrive pas tout le temps…). Mais à deux exceptions ces rencontres n’ont rien donné.

Il y avait eu ce rendez-vous en mars, simple, rafraîchissant, surprenant, presque « parfait »… mais qui n’avait pas abouti à grand chose au final. C’est bien d’avoir des atomes crochus, mais si au bout de deux mois on en a fait le tour…

Je m’étais peut-être un peu trop projeté dans cette relation, et j’ai sans doute eu tendance à entamer trop tôt la suivante, et sans en attendre grand chose, encore un peu bloqué sur cette déception. Quand on n’y croit pas, il n’y a rien de bon à attendre… et rien de bon n’est donc venu.

Les derniers mois de 2022 m’ont permis de réfléchir, de faire un point avec moi-même. Oui, c’est une façon de dire que la période fût assez vide.

Et on arrive au premier rendez-vous de l’année donc. Autant dire que j’y vais sans me projeter : nos conversations avaient été brèves et très épisodiques ces dernières semaines. Rien d’exaltant mais elle écrivait bien et faisait preuve d’humour. En ce moment, il faut croire que ça suffit. Quand elle a de nouveau proposé de se voir, je me suis senti un peu bloqué : ça faisait deux fois que je me trouvais des excuses faciles pour reporter, je savais bien qu’il faudrait accepter ou arrêter à un moment. J’ai donc accepté cette fois.

Aucune attente. J’y vais pour me remettre en selle plus qu’autre chose, espérant une conversation intéressante. On est vendredi, à peine quelques jours après les fêtes. Elle a prévenu qu’elle ne pourrait pas rester plus d’une heure et demi. Un alibi pour partir facilement au besoin ? Possible…

J’arrive avec quelques minutes d’avance à la brasserie convenue. Elle m’a envoyé un message peu avant pour dire qu’elle était déjà à l’intérieur. J’entre, la cherche des yeux. Je ne la reconnais pas, mais en grand détective que je suis, je me dis qu’il n’y a qu’une femme seule, et bien qu’elle soit de dos, ça doit donc être elle, sur cette chaise de bar à ma gauche.

Je m’approche en tentant de confirmer cette déduction lorsqu’elle pivote vers moi. En grand physionomiste, je ne reconnais toujours pas la femme des photos. Elle sourit, descend de la chaise pour me faire la bise, en se dressant sur la pointe de ses pieds. Je m’installe face à elle.

Elle me demande si je l’avais reconnu, parce qu’elle s’est faite éclaircir les cheveux et a changé de coupe par rapport aux photos. Je réponds quelque chose comme « Ah, c’est ça ! » mais je ne suis pas certain que je l’aurais reconnue même sans ces changements. Elle semble attendre un commentaire (un compliment ?). Qui a du mal à se formuler. Ça lui va pourtant bien, et elle semble plus jolie que sur les photos.

Devant mon mutisme, elle me tend la carte, que je fais semblant d’étudier quelques instants. Je viens régulièrement ici. On commence à discuter un peu puis on commande. Elle prend un cocktail sans alcool, me précise qu’elle travaille juste après.

La conversation se fait naturellement, elle change souvent de sujet, sans liens entre eux, mais toujours légers. Elle tique sur le sac Fnac que j’ai accroché à ma chaise. Du papier cadeau en dépasse, je lui explique que je rejoins des potes après et que c’est pour l’une d’elles. « Et rien pour moi ? » Elle prend un air faussement boudeur, mais ses yeux clairs et rieurs me font sourire.

On parle de sports. Elle n’en pratique pas vraiment, mais en suit beaucoup. On commande un second verre. On discute lecture, nos goûts divergent, mais elle s’intéresse depuis récemment à la fantasy. Je lui donne quelques conseils. Elle note quelques titres sur son portable. Je me demande si j’ai mal pitché les autres. La conversation continue. Elle regarde de plus en plus fréquemment l’heure, et rapidement la fin des 90 minutes retentit. Fin du match ? Elle me dit qu’elle doit vraiment y aller. On sort. Elle semble vraiment pressée. Elle me dit au revoir et tourne vivement les talons, ne se retourne pas.

Je ne sais pas quoi en penser, ni ce qu’elle en a pensé. C’était tout simple, mais le moment était plaisant. Je reçois rapidement un SMS proposant de se revoir « dimanche ou lundi ». La perspective me plaît. Je valide immédiatement sa proposition. L’année commence plutôt bien.

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